« 2020, année zéro du télétravail dans le secteur public »

Christine Cathiard
DOSSIER : L'amélioration de la qualité de vie au travail (AQVT)

Le Baromètre Wimi-Ipsos du Travail Ouvert est la première étude consacrée au télétravail dans la sphère publique. Réalisée pendant le second confinement auprès d’un échantillon représentatif de 1000 actifs, l’enquête dresse un comparatif inédit entre public et privé. La moitié des agents ont télétravaillé pendant le confinement, au lieu de 13% habituellement.

coronavirus teletravail
Le Covid va-t-il bouleverser l’organisation et la culture de travail dans la fonction publique plus profondément que des décennies de réformes de l’Etat ? C’est à cette question – entre autres – que le 1er Baromètre WIMI-Ipsos du Travail Ouvert propose de répondre.

Alors que seuls 13% des agents télétravaillaient avant la crise, la moitié des agents ont été amenés à travailler à distance pendant les confinements. Quels enseignements les agents tirent-ils de cette expérience ?

Quels sont les freins ou les atouts pour démocratiser le travail à distance ? Autrement dit, l’année 2020 est-elle une simple parenthèse ou l’amorce d’une révolution durable ?

Avec l’explosion de l’utilisation du Cloud, se pose la question de la protection des données professionnelles, données particulièrement sensibles dans l’administration. Les agents font-ils confiance dans les logiciels, souvent américains, qu’ils utilisent au quotidien ?

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Les agents n’étaient pas préparés au choc de 2020... mais tirent un bilan largement positif de leur expérience du télétravail.

Les agents jugent très majoritairement (73 %) que leur organisation n’était pas prête à affronter le premier confinement (vs. 52 % dans le privé)… et ils étaient encore une majorité à penser qu’elle ne l’était toujours pas pour le second confinement cet automne (51 % contre 40 % dans le privé).

Pour autant, les agents tirent un bilan largement positif de cette expérience : deux tiers (67%) ont bien vécu le second confinement d’un point de vue professionnel.

Le télétravail est synonyme de gain de temps pour 68% d’entre eux, d'efficacité dans le travail personnel (67%) et même de confort (69%), des chiffres comparables à ceux des salariés privés. Seule une minorité d’agents jugent que le télétravail a été pour eux synonyme de “galère” (31%) et de “stress” (24%).

Avec le confinement beaucoup d’agents ont néanmoins découvert aussi l’intrusion du travail dans leur sphère intime. 58 % jugent que le télétravail rime avec “horaires étendus” et seuls 56 % pensent que le télétravail est synonyme de meilleur équilibre vie professionnelle / vie privée.
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Le bureau reste le lieu privilégié du travail


Les agents souhaitent désormais “transformer l’essai” : 75% souhaitent télétravailler et 58 % au moins un jour par semaine. Néanmoins une large majorité des agents souhaitent que le bureau reste le lieu de travail principal : 81 % souhaitent y travailler la majorité de leur temps.

Alors l’année 2020 sera-t-elle celle de la grande bascule en matière de travail à distance ? c’est ce qu’estime une majorité d’agents publics - 59 % pronostiquent que “demain il y aura davantage de travail à distance” dans leur organisation et que “l’organisation du travail sera durablement impactée par la crise.”

Deux freins, culturel et technique, doivent encore être levés dans le secteur public :

• La culture du présentéisme est encore (trop) forte : 65% des agents jugent que, dans leur organisation, “les gens restent au bureau pour montrer qu'ils travaillent”. 53 % estiment même que les personnes qui travaillent à distance “sont considérés comme des planqués” (7 points de plus que dans le privé).

• L’inadaptation des outils est un obstacle : pour les agents, les problèmes d’équipement sont le premier facteur qui “rend difficile le développement du télétravail” dans leur organisation alors que cette explication arrive seulement en 3ème position dans le privé.
51 % des agents estime que les outils fournis ne sont pas adaptés au télétravail et moins d’un agent sur deux déclare avoir facilement accès à ses documents à distance.

Besoin d'outils en ligne


Et pourtant, le besoin d’outils de travail collaboratif est flagrant : 92% des agents du public pensent que pour chaque projet mené en équipe, les gens qui collaborent au projet devraient avoir accès en ligne à l'ensemble des documents.

Le confinement a agi comme un « super-révélateur » de la culture de travail. Les agents qui ont le mieux supporté le confinement sont ceux qui évoluaient déjà dans une équipe cultivant le travail ouvert : transparence, esprit d’équipe et confiance.

• Transparence : dans les organisations où “l’échange d’informations entre services est encouragé”, 71% des agents ont “bien vécu cette période de confinement d’un point de vue professionnel” : c’est 10 points de plus par rapport aux organisations où l’échange d’informations n’est pas encouragé.

• Esprit d’équipe : dans les organisations où le travail en équipe est encouragé, 71% des agents pensent que le télétravail est synonyme de gain de temps : c’est 12 points de plus par rapport aux organisations où le travail en équipe n’est pas encouragé.

• Confiance : dans les organisations où la hiérarchie fait confiance aux collaborateurs, 70% des agents ont “bien vécu cette période de confinement d’un point de vue professionnel” : c’est 8 points de plus par rapport aux organisations où la hiérarchie ne fait pas confiance aux collaborateurs.

Des clichés sur les fonctionnaires tombent


C’est l’occasion aussi de démentir certains clichés concernant la fonction publique : globalement les agents jugent, à des niveaux comparables et parfois supérieurs à ceux du privé, que leur organisation promeut le travail en équipe (74% vs. 75% dans le privé), la confiance (78% des agents de la fonction publique d’Etat estiment que la confiance règne entre collègues vs. 77% dans le privé) et dans un degré moindre, la transparence (68% vs. 75% dans le privé).

Le confinement et le travail à distance généralisé ont conduit les travailleurs (agents comme salariés) à héberger des documents sur le cloud et échanger davantage par visio-conférence, tchat, messageries, etc. Se pose dès lors la question de la confiance numérique, sujet particulièrement sensible s’agissant de données publiques manipulées par les agents.

• En matière de protection des données professionnelles, les actifs interrogés accordent une confiance plus élevée aux logiciels français et européens qu’aux logiciels américains, qui atteignent tout juste la moyenne. Les outils chinois souffrent quant à eux d’une forte défiance.
On observe autant d’écart de confiance entre logiciels chinois et américains (1,5 points) qu’entre logiciels américains et français.

• En matière de protection des données professionnelles, trois quarts (73%) des sondés ne font pas confiance aux logiciels chinois ; la moitié des personnes interrogées (49%) ne font pas confiance aux logiciels US. Une défiance deux fois et demie supérieure à celle affichée pour les logiciels français (21 % seulement).

• L’Etat devrait davantage acheter de logiciels français et européens :
  • 91% des sondés pensent que l'Etat et le secteur public devraient réaliser au moins la moitié de leurs achats de logiciels auprès d'acteurs français (dont 41% de “tout à fait d’accord") ;
  • 88% pensent que les entreprises devraient effectuer au moins la moitié de leur achat auprès d’acteurs français.
  • Une proportion quasi aussi importante considère que l’Etat (85%) ou les entreprises (84%) devraient s’approvisionner auprès d’entreprises européennes.

Retrouvez toute l’étude en 29 pages ici.

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