La numérisation des tâches va continuer à transformer les métiers de la fonction publique. Les plus impactés seront les professionnels des fonctions dites de support, tels que les secrétaires, les agents des finances, des ressources humaines… Cette numérisation frappe, qui plus est, de plein fouet les fonctionnaires les moins qualifiés. « Avec le déploiement de l'informatique, les employés administratifs notamment les catégories C ont déjà beaucoup perdu d'emploi en 20 ans. La décrue va se poursuivre » annonce Cécile Jolly, spécialiste de prospective des métiers et des qualifications à France Stratégie.
Vers une hausse générale des qualifications
La dématérialisation des activités présente aussi des bons côtés. Elle libère les agents des aspects les plus ingrats et chronophages de leur travail, ce qui leur permet de se recentrer sur leur cœur de métier. De fait aussi, les tâches sans valeur ajoutées étant assurées par des ordinateurs, les catégories C devront acquérir de nouvelles compétences. « On se dirige vers une augmentation en qualifications des métiers administratifs » considère Cécile Jolly. « Le télétravail, la collaboration en mode projet, qui aplatissent les organigrammes, sont d’autres facteurs qui participent eux aussi à la baisse des effectifs de ces métiers » poursuit-elle.
« Les métiers changent, le geste professionnel reste »
Haut les cœurs, dans les dix années à venir, les métiers les plus pourvoyeurs d'emploi de la fonction publique, le seront toujours. Ces métiers sont ceux des secteurs de la santé, de l’action sociale, de l’enseignement, de la sécurité et du nettoyage.
Répondant à des besoins essentiels de la population, ces professions ont tout lieu d’être préservés, y compris dans les périodes les plus difficiles, la dernière crise sanitaire que la planète vient de vivre en étant une bonne illustration. C’est la spécificité de ces métiers et leur dimension humaine qui rendent ces agents irremplaçables. Ce qui ne veut pas dire que ces professions n’évoluent pas… « Les métiers changent continuellement, le geste professionnel reste le même, le but professionnel demeure. Ce sont de nouveaux outils et les technologies qui apparaissent » commente Cécile Jolly
« Tout n’est pas écrit »
Les progrès technologiques peuvent toutefois aller très vite et prendre de court des secteurs qu’on croyait intouchables. La collecte robotisée des déchets ménagers commence à poindre au détriment de l’emploi dans le secteur. Une fatalité ? Sans doute pas, l’employeur a toujours le choix entre investir dans du matériel sophistiqué qu’il faudra entretenir, ou décider de préserver l’emploi local. "L’évolution des métiers peut ainsi venir de l’organisation du travail elle-même et des choix que les employeurs feront. Tout n'est pas écrit, on peut bien sûr toujours utiliser le numérique pour limiter les effectifs" analyse Cécile Jolly
Une profusion de données… à exploiter
Les professionnels du numérique et de l’informatique seront de plus en plus courtisés pour mettre leur expertise au service des agents d’une collectivité, d’un ministère, ou d’un hôpital.
Pour répondre aux questions des usagers, les services d’accueil s’appuient ainsi de plus en plus souvent sur les chatbots ou voicebots (agents conversationnels par texte ou vocaux). Autant de services qu’il va falloir mettre en place, ajuster et améliorer. Face à la croissance des données, les data scientist et les analystes de données vont eux aussi être d’un grand recours. Car l’exploitation des données va devenir de plus en plus cruciale pour optimiser les ressources d’une collectivité, d’un centre hospitalier ou d’un ministère, en vue de délivrer des services publics au bon moment, et au bon endroit. A telle enseigne que les services des urgences de certains hôpitaux s’appuient d’ors et déjà sur des logiciels d’intelligence artificielle alimentés par les données collectées. Ces logiciels permettent de prévoir l’afflux de patients et ajuster la présence du personnel soignant.