Supprimer des postes de fonctionnaires pour recruter des contractuels?
Le gouvernement prépare un plan de départs volontaires dans la fonction publique. On parle de 120.000 postes de fonctionnaires supprimés... Parallèlement, le recours aux contractuels sera généralisé et facilité. De quoi parle-t-on exactement ?
En février 2018, lors du premier Comité interministériel de la transformation publique (CITP), le ministre de l’Action et des comptes publics avait dévoilé un plan de "départs volontaires" sur quatre ans, lié aux 50.000 suppressions de postes souhaitées par l'exécutif dans la fonction publique de l'Etat. En octobre, au cours du 2e CITP, Gérald Darmanin a confirmé ces suppressions.
Le gouvernement encourage par ailleurs les collectivités territoriales et établissements publics locaux à supprimer 70.000 postes de fonctionnaires territoriaux. Notez bien le terme "encourager" : les employeurs locaux restent entièrement libres de leurs choix en la matière.
Est-ce "une nouvelle provocation de Gérald Darmanin ou un propos maladroit ?" s’interroge l’Unsa, citée par "la Gazette des communes". "A aucun moment, on ne nous a présenté ce scénario", déplore le 4e syndicat représentatif des fonctionnaires. Jusqu’alors, le gouvernement avait soumis aux organisations syndicales le projet d'un "contrat de mission" de six ans au maximum, qui prendrait fin une fois conclu le projet justifiant le recrutement.
Un plan de départs volontaires et le recours à des contrats de cinq, dix ou quinze ans
Il n’est plus question de contrat de mission pour le Premier ministre. Celui-ci a annoncé, la veille du CITP d’octobre 2018, "la généralisation du contrat" ; des contrats de cinq, dix ou quinze ans… Autrement dit, le recours accru et facilité aux contractuels. Ces derniers représentent déjà 1 million de personnes sur les 5,6 millions d'agents que compte l'ensemble de la fonction publique.
Il y aura la possibilité de passer par le statut et la possibilité de passer par le contrat. [Gérald Darmanin]
La méthode voulue par l’Etat : inciter les fonctionnaires à démissionner, moyennant une prime de départ de 24 mois de salaire et des allocations chômage, pratique usuelle dans le secteur privé, qui a pour nom "rupture conventionnelle".
La prime de précarité
La prime de précarité reçoit un accueil partagé des syndicats et du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Seuls les contractuels de 12 mois ou moins seront concernés, à partir de 2021, comme on peut le lire dans la Gazette des communes.
Une indemnité de départ volontaire plus séduisante
L'indemnité de départ volontaire (IDV) existe déjà dans la fonction publique. En 2017, seuls 745 fonctionnaires de l'Etat y ont eu recours pour une indemnité moyenne de 20.000 euros par agent, selon le ministère. Il est vrai que l'IDV, accessible sous conditions à l'ensemble tous les agents de la fonction publique, n'a pas de quoi séduire. Le montant de l'indemnité est calculée sur la rémunération brute, hors primes et indemnités, ces dernières représentant environ 22% du salaire brut d'un fonctionnaire! Et l'agent démissionnaire n'a pas droit au chômage.
Aussi, le dispositif va être toiletté pour devenir plus séduisant. Les candidats au départ auront "la possibilité de toucher le chômage", par exemple. La prime de restructuration de service sera doublée, pour atteindre 30.000 euros.
Une période de transition d'un an pour faire son choix entre le public ou le privé
A cela s'ajoute une passerelle de sécurité pour les volontaires : les agents détachés dans le privé seront payés et gérés par l'administration d'origine, avec la possibilité de revenir dans la fonction publique. "Aujourd’hui le détachement n’est possible que dans des entreprises publiques ou d’intérêt général, on veut que ce soit possible dans le secteur lucratif", explique-t-on à Bercy.
L’idée est d'offrir aux agents sur le départ un "sas", une "période transitoire" pour qu’ils puissent "passer la période de préavis sereinement"et même "revenir après un an s’ils le souhaitent". Si le fonctionnaire souhaite rester dans l’entreprise privée, il pourra alors démissionner et percevoir l’indemnité de départ volontaire.
Une agence de reconversion pour tous les fonctionnaires, inspirée de Défense mobilité
Par ailleurs, une agence de reconversion pour les agents de l'Etat, inspirée de celles des armées, "Défense mobilité", sera créée au second semestre 2019". Selon Matignon, ce dispositif de reclassement, "permettra d'avoir une force de frappe pour accompagner éventuellement des départs volontaires".
Ce n'est pas la fin de la fonction publique [...] (Emmanuel Macron)
Sur RTL, en février 2018, Olivier Dussopt, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des comptes publics, avait déclaré : "Un an de négociations" à venir avec les syndicats […] Des départs ne concernant pas "des plans massifs" de la fonction publique, avait simplement assuré Olivier Dussopt, mais des services précis, "où il y aura des restructurations", "des rapprochements" et d’éventuels "sureffectifs".
"Ce n’est pas la fin de la fonction publique, ce sont les conditions de sa pérennité véritable", avait, de son côté, appuyé Emmanuel Macron. "Il y aura la possibilité de passer par le statut et la possibilité de passer par le contrat", selon Gérald Darmanin.
50 millions d'euros pour ces "réformes structurelles à forte dimension RH"
Les syndicats de la fonction publique réagissent
"Sans attendre la fin de la concertation entamée sur l’élargissement du recours au contrat, sans attendre le projet de loi qui concernera la fonction publique annoncé pour 2019, le gouvernement fait le choix d’ouvrir largement aux contractuels les postes d’encadrement supérieur et dirigeant sur les trois versants de la fonction publique", a déclaré la CFDT Fonctions Publiques.
La priorité, ouvrir les concertations "nécessaires" avant l'examen du projet de loi
Celle-ci a regretté "la méthode retenue"et a proposé au gouvernement de "reporter l’examen de ces questions au projet de loi qui doit voir le jour en 2019.
De même, ce syndicat a appelé à ouvrir rapidement les concertations nécessaires aux garanties d’indépendance et de probité de la fonction publique (déontologie) et à la construction de droits et garanties pour les agents ayant vocation à occuper ces postes et emplois (modalités de recrutement, rémunérations, formation...), en généralisant les comités d’audition et en revoyant les compétences des commissions consultatives paritaires (CCP)".
Plus de "personnels non titulaires précaires", selon le syndicat Force ouvière
FO Fonction publique "alerte" le gouvernement : "C’est avec la plus grande solennité que nous souhaitons vous alerter sur les effets néfastes des projets que vous vous préparez à formaliser à travers un futur projet de loi. Sur les deux premiers chantiers, et après un point d’étape en juillet dernier qui semble malheureusement conclusif, aucune autre réunion n'ayant été programmée depuis, vos objectifs de supprimer le CHSCT (pour l’intégrer dans le CT) et de renvoyer l’égalité de traitement des agents à des règles souples de gestion locale en remplacement des CAP ou encore de recourir à davantage de personnels non titulaires (de fait, précaires) en remplacement de fonctionnaires, ne seront jamais partagés par Force ouvrière."
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