Jacques, prof de musique auprès de personnes handicapées

Reconverti en intervenant musical en milieu scolaire, Jacques Cordier s’est spécialisé il y a 15 ans dans l’enseignement de la musique auprès des personnes en situation de handicap. « Il faut aimer enseigner, avoir le goût pour l'improvisation afin d'être très accueillant vis à vis de ce public, et maîtriser la capacité d'arranger des musiques », explique ce guitariste, pianiste et percussionniste.

Spécificité encore plus rare, pour ne pas dire unique, le musicien adapte les instruments du commerce pour ce public. Un travail auquel il dédie une partie de son temps de travail avec une équipe pluridisciplinaire constituée de chercheurs, d'étudiants et d’ergothérapeutes. Enfin, cela ne s'invente pas : l'appétence que voue Jacques Cordier pour le « bricolage » lui vient de son premier métier : artisan dans le bâtiment.

Transformer les instruments du commerce pour les mettre à la porter des enfants et adultes handicapés : un challenge un peu fou, mais sans doute pas pour Jacques Cordier, musicien professionnel, dumiste et ancien ouvrier du bâtiment, détenteur d'un BEP de plomberie chauffagiste. Après une dizaine d'années à évoluer dans le milieu du bâtiment, le musicien décide de tout plaquer pour sa passion. Et de décrocher à 32 ans l’ancêtre du diplôme universitaire de musicien intervenant (Dumi).

Il fait ses premiers pas d’intervenant musical dans les écoles primaires de la région de Poitiers et de Chatellerault où il se forme à la composition, peaufine ses notions de jazz et sa pratique de l'improvisation. "J'ai continué à me former par moi-même : stages, terrain, lecture... Egalement dans le cadre de mon travail d'enseignant en écoles de musiques associatives et en MJC : direction d'orchestre jazz et rock, chorale", souligne-t-il.

Ecoutant l’appel de la montagne, il s’installe dans le Vercors où il oeuvre deux ans dans un centre de découverte spécialisé dans la musique, accueillant des enfants, puis dans différentes écoles de musique locale. Il monte un orchestre de jazz, un spectacle pour enfants. Il entre au conservatoire de Grenoble comme intervenant remplaçant, avant d'être titularisé.

« Faire de la mélodie pour une personne en situation d'handicapé, c'est parfois impossible. Les systèmes informatiques vont permettre de proposer tout un tas de scénarios musicaux », explique Jacques Cordier qui a, par ailleurs, au fil des années, inventé moult systèmes astucieux.

Une fois le musicien doté de son instrument de musique sur mesure, il reste encore du pain sur la planche pour l'enseignant. « Il faut créer des conditions favorables pour accueillir ces personnes, leur concocter des univers musicaux, qu'elles aient l'impression d'avoir toute leur place», souligne le musicien, qui adapte de fait des partitions en fonction des progrès de chacun. Sa curiosité insatiable pour toutes les musiques classiques, modernes et extra européennes l'a beaucoup nourri. Par cette approche globale et bienveillante, des groupes de musique mixte (valides et personnes handicapées) ont ainsi pu se former.

A la tête du département « Musique et handicap » au Conservatoire de Grenoble , Jacques Cordier proche de la retraite doit songer à transmettre le flambeau. D'autant qu'ils ne sont que deux salariés dans ce petit département. Le professionnel escompte créer des émules en proposant l'unité d'enseignement « Musique et Handicap » dans le cadre du Cycle d'Enseignement Professionnel Initial, préparant les futurs musiciens professionnels. « J’espère que, dans l’avenir, au niveau de la fonction publique, quelque chose va correspondre à mon métier », ajoute-t-il.