Personnels hospitaliers : une rentrée sous le signe du changement

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Publication pendant l'été des lois « Hôpital, patient, santé, territoire » et « Mobilité », ainsi que du décret réformant les études des infirmières ; décret imminent sur les agents en CDI... Emmanuelle Quillet, sous-directrice des ressources humaines du système de santé à la DHOS (ministère de la Santé), fait le point pour emploipublic.fr sur les nouveautés et les chantiers de cette rentrée 2009.M.D. : La loi Hôpital, patient, santé, territoire (HPST) a été votée le 21 juillet 2009. Que change-t-elle pour le personnel des hôpitaux ?
Emmanuelle Quillet, sous-directrice des ressources humaines du système de santé à la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) :
La loi HPST comprend des mesures spécifiques pour les directeurs d'établissement et des praticiens hospitaliers. Elle propose beaucoup d'outils pour répondre aux problèmes de démographie médicale, permet leur recrutement direct en tant que contractuels, le détachement de titulaires sur des contrats spécifiques avec des missions particulières et une part variable de rémunération, dans le cadre de contrats d'objectifs et de moyens, par exemple pour développer une activité insuffisamment représentée localement.RECRUTEMENTM.D. : Avec la loi Mobilité, le cumul d'activités entre fonctions publiques et avec le privé est facilité. Qu'est-ce que cela change pour la FPH ?
E.Q. : C'était déjà possible en milieu rural. Dans des établissements de petite taille et dans ceux qui ont du personnel territorial, cette disposition peut répondre à des besoins.
Mais, nous ne sommes qu'au début d'une réflexion sur l'amélioration des processus de recrutement. Par exemple, il n'y a pas de troisième voie dans la FPH. Et les concours sur titre ou sur épreuves restent les seules voies d'entrée. Cela peut être long et compliqué. Nous réfléchissons à l'évolution des concours, en commun avec les trois fonctions publiques et dans le cadre de la revalorisation de la catégorie B.
Autre disposition intéressante, la loi HPST introduit la liste d'aptitude qui permet le recrutement en dehors du classement. En catégorie A, cela peut être préférable.INTERIMM.D. : La loi Mobilité, promulguée le 3 août 2009, permet le recours à l'intérim dans la fonction publique. N'était-ce pas déjà le cas dans les hôpitaux ?
E.Q. : A côté des personnels en CDD et en CDI, les établissements médico-sociaux et les hôpitaux employaient des intérimaires sans cadre légal défini. La loi du 3 août 2009 confirme cette possibilité.M.D. : Quelle place occupe l'intérim dans l'emploi public hospitalier ?
E.Q. : L'intérim reste minoritaire bien qu'il ait fortement augmenté au cours des années 2000. La dépense s'élevait à 98 millions d'euros en 2006, 128 millions d'euros en 2008 pour l'ensemble des personnels intérimaires. 70 % de ces dépenses étaient consacrées aux infirmières et aides-soignantes en 2006, 59 % en 2008, car la part des missions d'intérim médical a augmenté, pour répondre aux difficultés de recrutement importantes dans certaines régions. C'est une variable d'ajustement face à des besoins qui ne peuvent être différés.M.D. : L'intérim ne risque-t-il pas de se substituer aux contrats et aux titularisations, et de fragiliser le statut de la fonction publique ?
E.Q. : Il ne répond pas aux mêmes besoins. Vu son coût, on ne peut se le permettre que pour répondre à des besoins de remplacement de quelques jours et pour assurer la continuité du service public.CONTRACTUELS ET EVALUATIONM.D. : La loi Dutreil de 2005 prévoit la transformation d'un CDD en CDI, après six années de contrats consécutifs. Elle semble peu appliquée dans les hôpitaux...
E.Q. : Le passage en CDI s'effectue quand il y a un poste. Les pratiques sont très hétérogènes. Les administrations incitent les contractuels, voire les forment, à préparer les concours. Le réflexe, c'est plutôt l'intégration. Un directeur d'hôpital fait appel à des jeunes en contrat pour gagner du temps car le recrutement par voie statutaire est long et aléatoire pour certains métiers. Mais ensuite, il les pousse à passer les concours pour faire carrière.
Le recrutement de contractuels répond à des besoins et se traduit assez régulièrement par une entrée dans la fonction publique. On voit aussi de jeunes diplômés en démarche qualité, finances, comptabilité, conditions de travail qui acceptent un contrat et des revenus inférieurs à ce qu'ils gagneraient dans le privé, pour acquérir de l'expérience, avant de se tourner vers d'autres employeurs.M.D. : Où en est le projet de décret sur les CDI dans la fonction publique hospitalière ? Ceux concernant la fonction publique d'Etat et la territoriale sont sortis en 2007...
E.Q. : Ce décret est à la signature. Il prévoit, pour les personnes en contrat à durée indéterminée, le réexamen de leur rémunération tous les trois ans en fonction d'une évaluation. Elle existe déjà dans de nombreux établissements, et des avenants sont possibles, mais sans automaticité.
Il s'inscrit dans l'évolution plus générale de l'évaluation qui se substitue à la notation dans la fonction publique. La loi Mobilité du 3 août 2009 prévoit la fin de l'expérimentation à l'Etat en 2011. Il nous appartient de nous lancer aussi dans cette évaluation des agents publics et d'en faire un outil de management.INFIRMIERESM.D. : Comment se passe la rentrée 2009 pour les infirmières ?
E.Q. : Elle se fait sur la base d'un nouveau programme de niveau licence (Bac +3) dans le cadre de la réforme européenne LMD (licence-master-doctorat). Les instituts de formation aux soins infirmiers (IFSI) se rapprochent des universités en passant des conventions avec elles et vont intégrer certains de leurs professeurs. Pour les professionnels, cette rentrée fera date. Et les autres professions paramédicales (assistants sociaux, masseurs kinésithérapeutes, sages-femmes, psychomotriciens...) ont vocation à entrer dans ce processus.Propos recueillis par Martine DoriacPhotos : © R. Bourguet