Christian Chédru, capitaine "Cantine" au grand cœur à la ville de Grenoble

Séverine Cattiaux • mis à jour le

Son job : la restauration collective. Issu du secteur privé, Christian Chédru a intégré, en 2005, la fonction publique territoriale. A 56 ans, il dirige le service de la restauration municipale et des moyens techniques à la ville de Grenoble (Isère). Et il a choisi de s’engager… en Afrique, dans l'aide humanitaire.

"Mon métier est passionnant. Je ne vis jamais la même journée ! Lorsque je ne suis pas en réunion, j'anticipe les problèmes, explique-t-il. "J'ai une vision à quelques jours, je suis là pour tracer la route, repérer les écueils et les éviter." Voilà pour le tempo. "Mon bureau est toujours ouvert" : élus locaux, parents, professionnels… Tout le monde peut le joindre directement. "Je ne filtre pas, c'est un choix." Voilà pour le style. Christian Chédru est passionné, ouvert et disponible. Du coup, ses journées sont "saccadées". "Je m'adapte : c'est ma force, et peut-être ma faiblesse, je dois être à la disposition de mes équipes, tout en leur rappelant de temps en temps que je suis le patron !"

La restauration municipale, un budget de 6 millions d'euros

Chaque jour, 9 000 repas sortent de la cuisine de la ville, 17 menus différents, expédiés à 100 points de livraison : écoles, maisons de retraite, crèches, etc. Christian Chédru est à la tête d’une unité de production qui crée de la valeur. "J'ai 65 personnes sous ma responsabilité (…) Dans ce métier , vous devez être un peu capitaine, à la manœuvre d’un gros bateau, avec une vingtaine de métiers : diététicien, pâtissier, chauffeur-livreur…, et 50 fournisseurs...".

Budget : 6 millions d’euros, pour faire tourner la cuisine centrale et le self municipal, verser les salaires, acheter les denrées, nourrir les enfants, payer les amortissements, les intérêts…

Il travaillait dans le privé, chez Sodexo, fournisseur de la ville

Son expérience dans le secteur privé lui a été profitable. Christian Chédru y a "grandi" de 1979 à 2005 : vingt-six ans chez Sodexo. "Au tout début, on parlait de gérant, on achetait des produits, on avait un budget dédié, à moindre échelle", rappelle-t-il. Dans ces années Sodexo, il fait de l'assurance-qualité, de la formation et de la gestion, comme "responsable exploitation" de différents établissements.

Cela ne me gêne pas de parler à mes équipes de productivité, de client, je ne parle pas d'usager. Je dis toujours que je suis le garant de la qualité de l'assiette, avec des équipes qui sont là pour m'épauler. Mon souci est que le convive soit satisfait.

Comme dans une PME privée, il faut gérer la croissance. La production de la cuisine centrale, de 1,2 million de repas en 2009, est passée à 1,5 million en 2012, soit 100 000 repas supplémentaires chaque année. Sa recette ? "On n'a pas changé l'équipe, ni allongé le temps de travail, mais on a changé l'organisation et aussi l’état d'esprit. On s'entraide, il n’y a plus de tension."

En 1995, ce Parisien arrive à Grenoble. Un retour aux sources. "La montagne m'a toujours manqué. Je venais souvent chez mes grands-parents ici." Christian Chédru travaille alors chez Sodexo, comme fournisseur de ville de Grenoble, quand il entend parler du projet de cuisine centrale de la ville, et pose sa candidature. Ce travail-là, explique-t-il, je l'avais fait vingt ans plus tôt, à Conflans-Saint-Honorine (Yvelines). En outre, les postes chez Sodexo ne me convenaient plus, trop tournés vers les services, moins vers la restauration (…) On peut comprendre que les salariés du privé aient envie d'offrir leurs compétences aux collectivités qui ont plus de moyens (…) De leur côté, les collectivités territoriales ont besoin de bons gestionnaires pour faire des économies."

Référent du projet de construction et d’organisation des locaux de la cuisine centrale de Grenoble

Christian Chédru devient le référent du projet de construction et d’organisation des locaux de la cuisine centrale de Grenoble en 2005. En 2007, il propose à la ville de reprendre les achats alimentaires en direct. "Je crée alors des marchés publics, fais des estimations économiques, car c'était aussi mon job à Sodexo."

La cantine est sur pied. L’économie générée par la reprise des achats des denrées alimentaires en direct permet de financer la cuisine centrale (400 000 euros). "Deuxième conséquence, qui n'est pas neutre : l’amélioration de la qualité de l’assiette", grâce à l’introduction de produits en circuit court, bio et du commerce équitable. "C'est plutôt une réussite, estime-t-il, et qui est reconnue par les élus."

Un chef branché "formation" et "qualité"

"J’ai également formé les équipes, ici, à Grenoble, et je continue de former celles du centre social, avec un temps plus contraint." La formation a toujours été l’un de ses moteurs. Dès 1986, pour Sodexo, Christian Chédru fait partie d'un groupe de gérants formateurs : "Nous allions partager nos compétences, tous les mercredis, suivant les besoins dans telle ou telle structure."

En 1997, on lui propose un poste d’animateur de formations dans la France entière. Il prend sous son aile 25 emplois-jeunes. Cette expérience ne dure qu’un an. "C'était très intéressant, mais très fatigant (…) A un moment, vous ne savez plus où vous habitez… Et il faut préserver sa vie privée !"

En 1994, il accède au poste de responsable de l'assurance-qualité. Sa mission aboutit à la toute première certification de Sodexo.

Aujourd’hui, la qualité est l’un de ses maîtres mots. "Les textes de loi qui évoquent la microbiologie font référence à des normes de qualité. Quand vous ouvrez une structure comme la nôtre, vous avez l'obligation d'obtenir un agrément : un pavé de textes que j’ai constitué pour Grenoble."

Christian... Un peu boulimique, non ?

Christian Chédru ne serait-il pas un peu boulimique ? Depuis 2012, il a aussi pris en charge "les moyens techniques". Epaulé par une petite équipe supplémentaire, il s'occupe des bâtiments des écoles, restaurants scolaires et maisons de l'enfance de Grenoble.

Cette nouvelle compétence s'inscrit dans le prolongement de ce qu'il fait. Précédemment, son service restauration avait déjà en charge toute la gestion des restaurants scolaires. Cette activité représente "pratiquement un mi-temps". Conséquence : il lui faut "absorber plus de mails, plus de validations de devis, de réunions"… Il délègue davantage à son adjointe et à ses responsables de production : encadrement de proximité, réunions de la commission restauration ou suivi des fournisseurs. Ses journées commencent à 7 h-7 h 30 et finissent à 18 h-18 h 30, dans le meilleur des cas.

En cas d'intoxication alimentaire, même si la réglementation a bien été respectée, qu'aucune faute professionnelle n'a été commise, c’est moi le responsable.

"Le bâtiment et la restauration sont des secteurs sensibles (…) Mon poste est très enrichissant, mais peu de personnes voudraient l'occuper, parce que les responsabilités sont lourdes : 12.000 écoliers... En cas d'intoxication alimentaire, même si la réglementation a bien été respectée, qu'aucune faute professionnelle n'a été commise, c’est moi le responsable (…) . C'est un métier, conclut Christian Chédrul, où il faut être humble. Même si je parais sûr de moi, je suis attentif à mes mots et, surtout, à mes interlocuteurs. Pour moi, le respect de la personne est essentiel."

Le "blanc des cantines" et le riz du Laos

Mission à Ouagadougou

Le Nassara des cantines
Pour la ville de Grenoble, jumelée avec Ouagadougou, Christian Chédru a accepté de conduire un projet de cantines scolaires, qui a pris une grande envergure : offrir un repas, le midi, à 5 000 élèves, dans trois écoles de Ouagadougou. Des enfants plus assidus à l’école, à présent. Les Africains l’appellent affectueusement "le Nassara" des cantines" (le blanc des cantines). Ils ont planté un citronnier à son nom. "C’est le projet professionnel de ma vie", confie-t-il.

 

Sur le bureau du chef de service, un baobab et une porteuse d’eau africaine. Sur les murs, des posters de photos d’écoliers, souriants. Un groupe de petits Africains autour d’une grande marmite de riz. Ces photos, il les a prises lors de ses "expéditions", une chaque trimestre depuis 2010, à Ouagadougou, au Burkina Faso.

L'Afrique, pour Christian Chédru, ce sont "les échanges passionnants avec les Africains", les mamans africaines, dont certaines devenues des amies, une façon de vivre le temps présent, la générosité. "Ils n’ont rien et sont prêts à tout partager." "J’ai été frappé de voir qu'à 4 000 km de chez nous, des gens vivent dans une telle difficulté, ça, c'est ce qui m'a choqué. Nous, on est en train de se battre pour le petit Grenoblois qui a un petit peu de gras autour de son morceau de viande (…) Autre chose m'a frappé : la mondialisation. Pour schématiser, dans le projet, je souhaitais utiliser du riz local. Or, celui-ci est hors de prix, et les Burkinabais se retrouvent à devoir acheter, au quotidien, du riz du Laos…"

Ce projet a changé Christian Chédru : "Dans la vie, on est tous de passage, mais ce truc-là, j'en suis très, très fier."

Les questions bizarres de la rédac

  • Votre situation familiale ? Marié et papa de trois grandes filles.
  • Vos loisirs ? Le ski de rando, le saxo, la course à pied, la marche et la moto.
  • Un livre, une expo, en ce moment ? L'Ebène, de Ryszard Kapuscinski, journaliste polonais. Ce livre me parle.
  • Votre salaire ? 3.800 euros nets par mois.
  • Si vous deviez choisir un tout autre métier dans la fonction publique...  Dans le secteur des achats ou de la formation.
  • Un "doudou" numérique ? Un Blackberry.
  • Accro aux réseaux sociaux ? Pas du tout, je n’ai pas d'amis !
  • Votre moment de la journée préféré ? Le matin, quand j'ouvre mon bureau et que je prends mon café tranquillement. Ma hantise, ce sont les mails !

 

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